Les tumeurs spléniques canines, bien que moins fréquentes que d'autres cancers, constituent un problème de santé significatif. Une détection précoce est essentielle pour optimiser les chances de succès thérapeutique. En moyenne, environ 5% des tumeurs canines affectent la rate. Prenons l'exemple d'un Berger Allemand de 8 ans ayant présenté une fatigue inexpliquée et une perte d'appétit, diagnostiquée comme un hémangiosarcome splénique.

La rate, un organe vital du système immunitaire, filtre le sang, recycle les globules rouges et stocke les plaquettes. Une tumeur, qu'il s'agisse d'un hémangiosarcome (le type le plus courant, représentant environ 70% des cas), d'un lymphosarcome, d'un fibrosarcome, ou d'autres types moins fréquents, compromet son bon fonctionnement, affectant la santé générale du chien. La taille moyenne d'une tumeur splénique diagnostiquée est de 6 cm, mais elle peut varier considérablement.

Détection d'une tumeur splénique canine

Le diagnostic d'une tumeur de la rate chez le chien peut être complexe car les premiers signes sont souvent vagues et non spécifiques.

Signes cliniques de la tumeur splénique

Les symptômes varient selon la taille, le type et l’extension de la tumeur. Les signes les plus fréquents incluent une fatigue excessive, une léthargie marquée, une anorexie conduisant à une perte de poids significative (jusqu’à 15% du poids corporel dans certains cas), une pâleur des muqueuses (gencives) et une faiblesse musculaire. Une augmentation significative du volume abdominal est souvent observable à l’œil nu, due à l’augmentation de volume de la rate elle-même. Des vomissements, une hématémèse (vomissements de sang) et un méléna (selles noires) peuvent indiquer une rupture de la tumeur ou une hémorragie interne. Le chien peut également présenter une sensibilité abdominale à la palpation.

Une douleur abdominale constante ou intermittente est un autre symptôme à surveiller attentivement. L'animal peut manifester une aversion pour le jeu et les activités physiques, préférant le repos.

Examen physique

Un examen physique complet par un vétérinaire est primordial. La palpation abdominale permet de détecter une éventuelle masse splénique, bien que sa position profonde rende la palpation difficile dans certains cas.

Examens complémentaires pour diagnostiquer une tumeur de la rate

Des examens complémentaires sont indispensables pour confirmer le diagnostic et caractériser la tumeur.

  • Échographie abdominale : L'échographie permet de visualiser la rate, de détecter la tumeur, d'en évaluer la taille (ex: 5cm, 10cm...), la forme, la texture (solide, kystique) et l’extension. Elle aide à déterminer l’implication des organes adjacents et à évaluer la présence d’épanchement péritonéal (liquide dans l’abdomen).
  • Radiographie thoracique : Une radiographie du thorax permet de dépister des métastases pulmonaires, signe d’une progression de la maladie. L'absence de métastases pulmonaires suggère un stade plus précoce.
  • Analyse sanguine complète : L'hématocrite, le nombre de plaquettes et les enzymes hépatiques sont analysés. Une anémie ou une thrombocytopénie (faible nombre de plaquettes) suggère une hémorragie interne, tandis que des taux d'enzymes hépatiques élevés peuvent indiquer une métastase hépatique.
  • Biopsie : Une biopsie, par aspiration à l’aiguille fine (cytoponction) ou par biopsie chirurgicale, est indispensable pour l'analyse histopathologique. L'examen microscopique du tissu prélevé identifie le type de tumeur (hémangiosarcome, lymphome, etc.) et son grade, éléments essentiels pour le choix du traitement. Le taux de réussite d’une biopsie par aspiration est d’environ 85%.

Cas clinique illustratif 1 : détection d'une tumeur splénique

Un Boxer de 7 ans a présenté une fatigue persistante et une perte d'appétit de plusieurs semaines. Une masse abdominale a été détectée à la palpation. L'échographie a révélé une masse splénique de 7cm. Une biopsie a confirmé un hémangiosarcome de grade intermédiaire.

Traitement d'une tumeur splénique canine

Le traitement dépend du type, de la taille, du stade de la tumeur et de la présence de métastases. La chirurgie est généralement le traitement principal, pouvant être complétée par d'autres approches.

Chirurgie : la splénectomie

La splénectomie, l'exérèse chirurgicale de la rate, est le traitement de première intention pour les tumeurs spléniques. Bien que significative, cette intervention est généralement bien tolérée par les chiens. Le taux de succès de la splénectomie seule est d'environ 60% à 70% pour les tumeurs de petite taille et de bas grade. Néanmoins, des risques postopératoires existent : hémorragie, infection, douleur. Une préparation rigoureuse et des soins postopératoires attentifs sont cruciaux. La durée d'hospitalisation est variable, mais se situe généralement entre 2 et 5 jours.

Chimiothérapie

La chimiothérapie est utilisée avant la chirurgie (néoadjuvante) pour réduire la taille de la tumeur, après la chirurgie (adjuvante) pour éliminer les cellules cancéreuses résiduelles, ou en monothérapie si la tumeur est inopérable. Les protocoles varient selon le type de tumeur. Les effets secondaires (vomissements, diarrhée, anorexie, myélosuppression) sont gérés avec des traitements symptomatiques. La durée du traitement peut aller de quelques semaines à plusieurs mois. On observe une augmentation de la survie de 10% à 25% avec l’ajout d’une chimiothérapie.

Radiothérapie

La radiothérapie est rarement employée pour les tumeurs spléniques, en raison de la localisation profonde de la rate. Elle peut être envisagée dans des cas spécifiques, notamment en cas de métastases locales ou d'inopérabilité de la tumeur. Son efficacité est limitée.

Thérapies ciblées

Des thérapies ciblées, plus récentes, sont en développement. Elles ciblent spécifiquement les cellules tumorales, minimisant les effets secondaires. Leur disponibilité et leur efficacité varient selon le type de tumeur.

Traitements complémentaires

La gestion de la douleur est primordiale après la chirurgie. Des analgésiques sont administrés. Un soutien nutritionnel est essentiel pour maintenir le poids et l'appétit. En cas d’anémie sévère, une transfusion sanguine peut être nécessaire. La surveillance régulière du chien est indispensable afin de détecter précocement tout signe de récidive ou de complication.

Cas clinique illustratif 2 : traitement d'une tumeur splénique

Le Boxer mentionné précédemment a subi une splénectomie. Une chimiothérapie adjuvante a été administrée pendant 4 mois. Un suivi régulier a été mis en place, et le chien a présenté une bonne qualité de vie pendant 18 mois après le traitement.

Pronostic et surveillance post-traitement

Le pronostic est influencé par plusieurs facteurs : taille de la tumeur, type histologique, présence de métastases, réponse au traitement. Un suivi régulier est indispensable après le traitement.

Des consultations de suivi, analyses de sang, échographies et radiographies sont recommandées pour surveiller une éventuelle récidive ou métastase. La gestion de la douleur et le maintien de la qualité de vie sont primordiaux. L'espérance de vie moyenne après le diagnostic d'une tumeur splénique est d'environ 12 à 18 mois, mais elle peut varier considérablement selon le type et le stade de la tumeur.

Des examens réguliers, une alimentation adaptée et une attention portée aux signes cliniques permettront de détecter précocement une éventuelle récidive. Une collaboration étroite entre le vétérinaire et le propriétaire est essentielle pour assurer les meilleurs soins possibles et optimiser le confort et la qualité de vie du chien.